15.3.04

Alessandro Baricco

De "Soie", ed. Gallimard, collections Folio, tradução de Françoise Brun.

A mais bela carta de amor que me foi dado ler:

"Mon seigneur bien-aimé,

n'aie pas peur, ne bouge pas, garde le silence, personne ne nous verra.

Reste ainsi, je veux te regarder, je t'ai tellement regardé mais tu n´étais pas pour moi et à présent tu es pour moi, ne t'approche pas, je t'en prie, reste comme tu es, nous avons une nuit pour nous seuls, et je veux te regarder, jamais je ne t'ai vu ainsi, ton corps pour moi, ta peaux, ferme les yeux, et caresse-toi, je t'en prie,

n'ouvre pas les yeux, si tu le peux, et caresse-toi, tes mains sont si belles, j'ai rêvé d'elles tant de fois que je veux les voir maintenant, j'aime les voir ainsi, sur ta peau, continue, je t'en prie, n'ouvre pas les yeux, je suis là, personne ne peux nous voir et je suis près de toi, caresse-toi mon bien-aimé seigneur, caresse ton sexe, je t'en prie, tout doucement,

elle est belle, ta main sur ton sexe, ne t'arrête pas, j'aime la regarder et te regarder, mon bien-aimé seigneur, n'ouvre pas les yeux, pas encore, tu ne dois pas avoir peur, je suis près de toi, m'entends-tu? je suis là, à te frôler, c'est de la soie, la sens-tu? c'est la sie de ma robe, n'ouvre pas les yeux et tu auras ma peau,

tu auras mes lèvres, quand je te toucherai pour la première fois ce sera avec mes lèvres, tu ne sauras pas où, à un certain moment tu sentiras la chaleur de mes lèvres, sur toi tu ne sauras pas où si tu n'ouvres pas les yeux, ne les ouvre pas, tu sentiras ma bouche, tu ne sauras pas où, tout à coup,

ce sera peut-être dans tes yeux, j'appuierai ma bouche sur tes paupières et sur tes cils, tu sentiras la chaleur pénétrer à l'intéreur de ta tête, et mes lèvres dans tes yeux, dedans, ou bien ce sera sur ton sexe, j'appuierai mes lèvres, là, et je les entrouvrirai en descendant peu à peu,

je laisserai ton sexe ouvrir ma bouche, pénétrer entre mes lèvres, presser contre ma langue, ma salive descendra le long de ta peau jusque dans ta main, mon baiser et ta main, l'un et l'autre mêlés, sur ton sexe,

et puis à la fin je baiserai ton coeur, parce que je te veux, je mordrai ta peau qui bat sur ton coeur, parce que je te veux, et quand j'aurai ton coeur sous mes lèvres tu seras à moi vraiment avec ma bouche dans ton coeur tu seras à moi, pour toujours, si tu ne crois pas alors ouvre les yeux mon bien-aimé seigneur et regarde-moi, je suis là, quelqu'un pourra-t-il jamais effacer cet instant, mon corps que la soie ne recouvre plus, tes mains qui le touchent, tes yeux qui le regardent,

tes doigts dans mon sexe, ta langue sur mes lèvres, toi qui glisses sur moi, et prends mes hanches, et me soulèves, et me laisses glisser sur tn sexe, doucement quelqu'un pourrait-il effacer cela, toi qui en mi lentement bouges, tes mains sur mon visage, tes doigts dans ma bouche, le plaisir dans tes yeux, ta voix, tu bouges lentement et cela me fait presque mal, mon plaisir, ma voix,

mon corps sur le tien, ton dos qui me soulève, tes bras qui ne me laissent pas partir, les coups à l'intérieur de moi, la violence et la douceur, je vois tes yeux chercher les miens, ils veulent savoir jusqu'où me faire mal, jusqu'où tu veux, mon bien-aimé seigneur, il n'y a pas de fin, cela ne peut finir, ne le vois-tu pas? personne jamais ne pourra effacer cet instant, pour toujours tu lanceras ta tête en arrière, en criant, pour toujours je fermerai les yeux, laissant mes larmes se détacher de mes cils, ma voix dans la tienne, ta violence à me sentir serrée, il n'y a plus de temps pour fuir ni de force pour résister, cet instant là devait être, cet instannt est, crois-moi mon bien-aimé seigneur et cet instant sera, maintenant et à jamais, il sera, jusqu'à la fin,

- Nous ne nous verrons plus, mon seigneur.

- Ce qui était pour nous nous l'avons fait, et vous le savez. Croyez-moi: nous l'avons fait pour toujours. Gardez votre vie à l'abri de moi. Et n'hésitez pas un instant, si c'est utile à votre bonheur, à oublier cette femme qui à présent vous dit, sans regret, adieu.


Para apreender a beleza deste texto em toda a sua plenitude é imprescindível ler o livro. Leiam-no. É imprescindível.

Sem comentários:

Enviar um comentário

Não prometo responder a todos os comentários, mas prometo que fico grato por todos.